Retour à l'Accueil Retour à l'Accueil

L'antiquité dans l'architecture

Vue de l'abside
Vue de l'abside
Porte d'Arroux
Porte d'Arroux
Arcades aveugles au-dessus de la claire-voie de la nef
Arcades aveugles au-dessus de la claire-voie de la nef
Façade extérieure du bras est du transept
Façade extérieure du bras est du transept

1ère phase de construction

La cathédrale Saint-Lazare a été construite en deux phases, dont la première commence aux alentours de 1110 et concerne la partie inférieure de l'abside, des absidioles et des bas côtés du choeur. Après une pose dans la construction et un changement dans la conception, une deuxième campagne achève le reste de l'édifice, à peu près entre 1125 et 1150.

Dès sa conception, la référence à l'architecture classique semble avoir été centrale dans le projet de construction de la cathédrale. Ainsi, les éléments de la première phase montrent une grande fidélité aux modèles gallo-romains disponibles à Autun. Dans l'abside, la haute plinthe, l'étage inférieur des cinq fenêtres ainsi que les arcs aveugles qui les flanquent datent de cette première phase. Ces éléments sont divisés verticalement par huit pilastres cannelés qui adoptent fidèlement les standards romains, visibles par exemple dans les moitiés inférieures des pilastres de l'arcade extérieure de la Porte d'Arroux. De nombreux éléments du "vocabulaire architectural" antique sont ainsi repris : bases attiques, plinthe, arcs en plein-cintre, ornementations florales, colonnettes, chapiteaux. 

2ème phase de construction

 La deuxième phase de construction va elle aussi dériver en partie de l'influence des éléments architecturaux antiques, mais avec beaucoup plus de liberté, l'incorporation du vocabulaire antique se faisant moins organique et les éléments étant modifiés ou restructurés avec moins de restriction. Cette différence se voit bien dans l'abside, où le niveau supérieur, qui date de la deuxième phase de construction, répète la même disposition que le niveau inférieur, mais avec des proportions altérées, des différences de traitement des pilastres, l'absence de colonnettes et la présence de chapiteaux historiés et végétaux.

Par ailleurs, les caractéristiques stylistiques des chapiteaux des pilastres montrent une importante modification dans le programme sculpté, avec l'arrivée de l'atelier associé à Gislebertus. Dans l'abside, les changements illustrent parfaitement la manière dont les éléments antiques ont été employés dans l'architecture de la seconde campagne : bien qu'hérites du parti initial, ils ont été modifiés et ajustés pour s'adapter à l'échelle amplifiée et à l'esthétique du nouveau programme. 

Des interprétations libres des modèles antiques

De même, dans le reste de l'édifice, les éléments architecturaux sont en partie toujours hérités du monde antique et l'on retrouve par exemple des pilastres cannelés délimitant les travées, supportant les arcs des grandes arcades et les arcs-doubleaux des voûtes d'arêtes des bas-côtés, ou encore séparant les arcs aveugles du faux triforium. Pour autant, ces éléments ne constituent pas des répliques de modèles anciens, mais plutôt des imitations synthétiques au service d'une esthétique résolument romane. Il semble que les constructeurs aient eu une grande liberté d'interprétation des modèles antiques. Un autre exemple est visible dans le traitement du motif d'arcade dérivé de la porte d'Arroux, qui est parfois simplifié et affaibli par un aplatissement de l'arcade sur un plan unique et un rainurage minimaliste des pilastres.

Des influences partagées

Vue de l'élévation de la nef
Vue de l'élévation de la nef

Il faut également rappeler que les éléments décoratifs majeurs, tout comme le système des pilastres intérieurs, peuvent être considérés comme génériques à cette époque, puisqu'on les rencontre à Cluny et ailleurs, et et qu'il ne doivent donc pas nécessairement indiquer l'influence directe d'un monument antique local. Par ailleurs, la manière dont ces éléments sont appliqués à la structure et aux surfaces murales est ne relève d'aucune fonction architectonique : leur conception est plus axée sur leur effet visuel que sur un prétendu rendu "correct" de la pratique antique, au contraire de ce qui avait été fait dans la première phase de construction. Les éléments architecturaux inspirés des temps antiques n'étaient donc pas des copies mais des imitations libres faisant parties du savoir-faire des maçons et adaptées à la structure de l'église en construction. Il en est ainsi de certains chapiteaux intérieurs de types corinthien, qui loin d'être des copies sont souvent des variations très stylisées, voire fantaisistes, autour du modèle classique qui était facilement accessible. 

 

Ainsi, la relation entre l'architecture antique et l'architecture de la cathédrale, si elle est indéniable, est cependant plus complexe qu'il n'y parait : si nombre d'éléments architecturaux trouvent leur origine dans l'antiquité romaine, dont les vestiges étaient visibles lors de la construction, l'élévation est belle est bien médiévale

 

Walter BERRY, Le recours à l'antique à Saint-Lazare d'Autun, dans "Les cahiers de Saint-Michel de Cuxa - XXXIX (2008) - Actualité de l'art antique dans l'art roman - Actes des XXXIXème Journées Romanes de Cuxa, 6/13 juillet 2007", Association culturelle de Cuxa, 2008